CAMEROUN: TRADITION BAMILÉKÉ: LES OBSÈQUES ROYALES.

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La tradition des natifs de NTHU-NKEU (Haut-Nkam), garde bien de rites et rituels positifs, progressistes et éducatifs que nous devons protéger, à défaut de les améliorer pour mieux les adapter à notre siècle de vitesse et du numérique. L’organisation des funérailles royales fait partie de cette catégorie.

L’adage bien de chez nous affirme que « le Roi ne meurt pas, il va en voyage ». Le siège royal n’est donc jamais vacant et, même en ces temps de communication ultra rapide, on ne devrait pas dire au peuple que le roi est mort sans avoir pris les dispositions qui s’imposent pour faire ses obsèques et installer le nouveau monarque. C’est pour cela que, même en Europe, du temps de la monarchie, un adage populaire disait ‘le Roi est mort, Vive le Roi !’.

Nous ne nous étendrons pas sur les rites de veuvage qui sont identiques à ceux du commun des mortels, c’est-à-dire qu’à partir du moment où les initiés ont inhumé le de cujus, les veuves doivent manifester leur amour envers leur mari et seigneur, en ne faisant uniquement que leurs toilettes intimes, en dormant sur des feuilles sèches de bananiers et en évitant de déraper ou de tomber dans le péché mignon des femmes avec les serviteurs et autres petits copains qui, du vivant du monarque, leurs donnent le sommeil quand Sa Majesté est dans la case de l’autre.

Nous n’aborderons pas non plus les rites que doivent subir les princes, que l’on fait quitter la chefferie dans les heures ou les semaines qui suivent le décès et l’inhumation de leur père, et à qui les parents de la famille maternelle font subir les rites de blindage pour qu’on ne les élimine pas ou pour qu’ils puissent être coptés comme héritiers du trône en dépit du testament laissé par leur géniteur ! Les magouilles et la corruption ne datent pas d’aujourd’hui.

Les obsèques et funérailles royales.

Quand le de cujus casse sa pipe, la première chose que fait celui qui se trouve à son chevet (s’il meurt sur son lit) ou près de lui (s’il avale son acte de naissance de suite d’un accident routier ou du champ d’honneur s’il grimpait le mont de Vénus), c’est de lui mettre une cagoule (généralement un sac en fibre de raphia) sur la tête. Cela pour plonger son esprit et ses mannes dans la nuit des temps et les empêcher de revenir faire du mal à son peuple : ne dit-on pas qu’un chef est chef, même en caleçon de bain ? Tant qu’on ne l’a pas conduit à sa dernière demeure dans le caveau royal, il reste une bombe H pour la terre entière, le roi n’étant roi seulement pour son peuple, mais de tous les peuples.

L’INHUMATION

C’est ici que l’on découvre et que se vérifie le vieil adage qui attribue au Bamiléké le titre de JUIF. En effet, sur le plan économique, les Bamiléké ont la tradition du grenier, qui consiste à stocker une partie de la moisson pour les jours de vaches maigres, à ne dilapider ses sous que pour raison de force majeure, à ne manger de la bonne chère ou à faire des exubérances festives qu’en de grandes occasions (mariages, funérailles, intronisation, etc.). Mais le commun des mortels, le néophyte ne sait pas que le Bamiléké est juif jusqu’aux bouts des ongles, jusqu’à sa racine originelle. On va le voir avec l’inhumation des rois.

Lorsque la dépouille est en sécurité dans le lieu du caveau des rois, en présence du croquemort royal qu’on a alerté dès que l’illustre despote a cessé de respirer, les sept notables de droit présents s’empressent de la dépouiller des objets précieux qu’elle porte : bague, chapeau, montre, anneaux, colliers, cornes, etc. selon un protocole vieux de plusieurs siècles.

La cause de cette action est double :

  • En application de ce verset biblique (donc hébreux) qui dit à l’homme ; ” Memento homo qui pulvis es, et in pulverem…” (Souviens-toi homme que tu es poussière et en poussière tu….). Les 7 notables dépouillent le de cujus de tous ces oripeaux de gloire qui peuvent résister à la décomposition et que des maraudeurs ou des brigands éventuels peuvent un jour découvrir après le transfert du site de la chefferie à un autre lieu. Par ailleurs, on veut que le corps du roi pourrisse le plus rapidement possible pour devenir engrais fertilisant la chefferie sur tous les plans pendant que son esprit et ses mannes volent vers l’enfer ou le ciel selon que son œuvre a été bénéfique pour son peuple ou maléfique pour la communauté.

  • Ce petit trésor sert d’attestation de décès et d’inhumation du de cujus et les 07 notables présents sont des huissiers testamentaires (ils le sont de père en fils, donc héréditairement). C’est pour cela qu’il est quasi impossible de trouver dans une chefferie Bamiléké des objets personnels ayant appartenus à tel ou tel monarque. Ils sont jalousement éparpillés et bien gardés par les sept notables depuis la fondation de la chefferie. Cet éparpillement de certains joyaux de la couronne a permis à nos différentes chefferies de conserver leur spécificité disséminée chez les sept notables de chaque chefferie. (ceci fera l’objet d’une autre publication)

Quand les 07 notables se sont partagés proportionnellement et conformément au protocole sus évoqué, la dépouille est revêtu alors des vêtements royaux (biodégradables ! qui seront dévorés par les mites (sorte d’insectes) en moins de 2 mois), puis un des sept notables tâte la dépouille pour vérifier qu’il part vraiment comme il est venu, c’est-à-dire s’il n’y a rien de précieux qui reste sur le corps.

La dépouille est alors remise au croquemort royal pour la suite de la cérémonie. Pour que ce dernier reçoive le corps, on doit avant tout  lui donner ses honoraires (argent, bétail, attirail divers, parfois même une femme quand il s’agit d’un monarque dans royaume important) qu’il compte avec minutie et s’en va les cacher dans un endroit secret dont lui seul maîtrise l’itinéraire. Personne ne le suit et quand il revient, il déclare avec solennité « Je vais faire le travail que mon père a fait et que nous ferons de générations en génération; jusqu’à la fin des temps, que j’espère, ne viendront jamais… »

Seul, il encorde le mort, seul il le tire vers la tombe, seul il le jette dans la fosse, seul il recouvre le corps qui fut monarque et que le roi des mites va en faire son dîner. Les anthropologues curieux peuvent observer que le LA’KAM et autres lieux sacrés de nos chefferies sont toujours cernés par des termitières et fourmilières variées que la main humaine ne détruit pas.

Après avoir réalisé sa basse besogne ou sa besogne basse, qui finit généralement tard dans la nuit, il se fond dans la nuit noire et l’on n’entendra plus jamais parler de lui jusqu’à la mort du monarque qui va prendre le trône après son départ.

Pendant qu’il traverse les différentes barrières du village ou divers postes de contrôle de la chefferie, les vigiles du NKOU’GA’ du fond de leur masque lui crient cette malédiction « Va-t’en, maudit croquemort et ne reviens jamais ici. Que ton descendant s’il veut entrer dans notre chefferie, arrive ici après une centaine d’années » ; une manière très ésotérique ou poétique de souhaiter la bienvenue au Prince héritier qu’on va désigner d’ici quelques temps !

Les sept notables aspergent le caveau d’eau bénite (à la manière de nos ancêtres), exorcisent les lieux pour chasser les démons, les vampires, les ennemis virtuels que les princes voisins expansionnistes, ambitieux et conquérants pourraient être tentés d’envoyer en ces lieux particuliers. Ils récitent ensuite les prières incantatoires pour implorer le Dieu des ancêtre à « aveugler et dérouter » toute puissance ou toute personne qui tenterait de venir déranger la tranquillité des morts et leur repos éternel. Puis ils scellent la porte du caveau qui ne sera plus ouvert que lorsqu’on reviendra enlever le crâne du de cujus pour aller conserver comme relique dans le musée spécial du palais où reposent d’autres pères fondateurs.

Cette phase ésotérique des obsèques royales méritait d’être révélée au public pour montrer le sacré de nos rites qui découlent de la tradition juive ou hébraïque. Cela explique pourquoi les missionnaires colons ont exigé des fidèles qu’ils viennent enterrer leurs morts au cimetière de la mission car les rites chrétiens ressemblent à s’y méprendre à nos rites traditionnels. (à suivre)

TAANI TAA SIEYADJE CHARLES, le Scribouillard

 

 

je ccontinue à  me battre ! bonne nujit !

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