La résistance aux antimicrobiens (RAM) est devenue l’une des crises sanitaires les plus urgentes à l’échelle mondiale. Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), la RAM pourrait causer jusqu’à 10 millions de décès par an d’ici 2050, un chiffre qui dépasse largement celui des décès liés au cancer. Cette situation alarmante a été au centre des discussions lors des travaux qui se sont tenus à Yaoundé, du 16 au 22 novembre 2024, sous la présidence du ministre de l’Élevage, des Pêches et des Industries Animales, Dr Taïga. L’objectif de cette rencontre était de mettre en place des solutions concrètes pour lutter contre l’émergence et la propagation des infections résistantes aux médicaments.
Qu’est-ce que la résistance aux antimicrobiens (RAM) ?
La RAM fait référence à la capacité des micro-organismes – tels que les bactéries, les virus, les parasites et les champignons – à résister aux effets des médicaments antimicrobiens, y compris les antibiotiques, utilisés pour les traiter. Cela rend les infections de plus en plus difficiles à traiter, entraînant des complications graves et un taux de mortalité plus élevé. Par exemple, une simple infection cutanée pourrait rapidement devenir fatale si elle devient résistante aux antibiotiques courants. De plus, la RAM compromet les traitements pour des maladies graves telles que la pneumonie, la tuberculose et les infections liées aux interventions chirurgicales.
Les causes et les facteurs de la RAM
Les causes de la RAM sont multiples et complexes. L’un des principaux facteurs est la mauvaise utilisation et la surutilisation des antibiotiques dans la santé humaine. Beaucoup de patients, par exemple, demandent des antibiotiques pour des infections virales contre lesquelles ils sont inefficaces, comme le rhume. En outre, la vente non régulée de médicaments et la prescription excessive contribuent également à cette situation.
Dans le secteur agricole, l’utilisation d’antibiotiques pour stimuler la croissance des animaux, ainsi que leur utilisation pour prévenir les maladies dans des environnements à forte densité, est également une cause importante de la RAM. Ces pratiques permettent aux bactéries de se développer, d’évoluer et de devenir résistantes. L’usage d’antibiotiques dans l’agriculture animale a des conséquences directes sur la santé humaine, car les résistances peuvent se transférer via la chaîne alimentaire.
La résistance aux antimicrobiens est aussi exacerbée par un manque de prévention et de contrôle des infections, une hygiène insuffisante, ainsi qu’un accès limité à des services de santé et à l’eau potable. Dans les régions où les infrastructures sont fragiles, la propagation des infections résistantes aux médicaments devient une menace immédiate pour la santé publique.
L’urgence de la lutte contre la RAM
Face à cette crise, des solutions doivent être mises en place pour enrayer la propagation de la RAM. Tout d’abord, il est essentiel de promouvoir une utilisation plus responsable des antibiotiques. Cela inclut la réduction de leur utilisation dans l’agriculture et dans le traitement des infections virales. De plus, une surveillance renforcée des pratiques médicales et agricoles est primordiale pour éviter une surconsommation inutile des médicaments.
Il est également nécessaire de renforcer les systèmes de prévention des infections, en mettant l’accent sur l’hygiène, la vaccination et les mesures de contrôle dans les établissements de santé et dans les milieux communautaires. En parallèle, la sensibilisation des professionnels de santé, des décideurs politiques et du grand public à la RAM est fondamentale pour provoquer un changement d’attitude et d’approche face à cette menace.
La Semaine mondiale de sensibilisation à la RAM
Dans cette lutte contre la résistance aux antimicrobiens, la Semaine mondiale de sensibilisation à la RAM (WAAW) constitue un moment-clé. Cette campagne mondiale, organisée chaque année par l’OMS, vise à sensibiliser les populations à la gravité de la RAM et à promouvoir des pratiques responsables parmi les parties prenantes de « Une seule santé ». Ce concept, qui fait référence à l’interdépendance de la santé humaine, animale et environnementale, est au cœur de la lutte contre la RAM.
En Afrique, la campagne WAAW est dirigée par plusieurs organisations internationales, dont les Centres Africains pour le Contrôle et la Prévention des Maladies (CDC Afrique), le Bureau Interafricain des Ressources Animales de l’Union Africaine (AU-IBAR), ainsi que l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) et le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE). Ces acteurs unissent leurs efforts pour réduire l’émergence et la propagation des infections résistantes aux médicaments sur le continent.
Une action globale nécessaire
La résistance aux antimicrobiens ne connaît pas de frontières. Elle est un problème global, et la seule manière d’y faire face est par une action concertée à l’échelle mondiale. Les gouvernements, les organisations internationales, les chercheurs et les acteurs communautaires doivent unir leurs efforts pour empêcher que cette crise ne prenne des proportions incontrôlables. La RAM pourrait bien devenir l’un des défis sanitaires majeurs des prochaines décennies, à moins que des mesures urgentes et soutenues ne soient prises.
Il est donc crucial que l’on agisse maintenant pour protéger la santé publique mondiale et prévenir une future pandémie rendue encore plus dévastatrice par des bactéries résistantes aux médicaments.