CAMEROUN: L’arbre "Sacré" chez les Bamiléké.

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Notre tradition est d’une telle richesse et d’une telle ancienneté qu’il faut savantissime pour n’en définir rien que ses contours à défaut de les explorer. « Le jour où le Bamiléké retrouvera l’atome originel de sa tradition actuellement hybride, la terre deviendra vraiment édénique et les peuples nous copieront et il n’y aura plus de bruits de canons et des bottes ».

Cette assertion semble utopique à première vue, mais il faut prendre le temps de lire nos articles (découvertes) pour mieux l’appréhender. La colonisation, avec l’épée démoniaque du christianisme, y a semé le « bordel » tant elle a tout chamboulé, tout bouleversé, tout mis sens dessus-dessous.

Entamons notre premier article de la série par le « Sacré » chez le montagnard de l’Ouest.

La forêt a toujours été pour l’homme Bamiléké un endroit où conserver son trésor spirituel, social, culturel et économique. Les réunions secrètes (Conseil des Notables, Presbyterium, Tribunal des personnalités importantes, concertations, conseils de guerre, etc.) se tenaient en forêt, au pied de l’arbre millénaire qui était généralement une essence précieuse.

Avant les années 80, il y avait dans tous les villages Bamiléké, un arbre géant d’un diamètre d’au moins deux mètres et c’est à ses pieds que l’on déposait son fardeau si l’on était fourbu ou ses bagages quand on voulait se rendre pour quelques temps chez un ami ou à la chefferie pour annoncer une nouvelle.

Le fardeau ou les bagages pouvaient faire une semaine, voire un mois au pied de l’arbre sacré sans qu’un main malveillante ne les touche ou qu’un brigand le chaparde. Les plus grands bandits évitaient de toucher aux affaires déposées sous l’arbre sacré sous peine de malédiction !

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Pour les populations ingénues, l’arbre était la demeure des sorciers, des revenants ou le lieu de rencontre nocturne des voyants, des divinités et autres confréries ésotériques. Les sorciers et prêtres faisaient tout pour laisser les âmes simples et les langues pendantes dans leur ignorance.

L’influence de la colonisation!

La colonisation, avec l’épée démoniaque du christianisme a fait couper toutes ces essences, prétendant tantôt que c’était un arbre où habitait Satan ou que le Christ ne pouvait admettre dans son paradis des âmes de ce village où Satan séjournait.
Les pauvres villageois, néophytes ou tout simplement naïfs, coupaient l’arbre sacré au grand dam des rois, des prêtres et des notables et les missionnaires le sciaient et expédiaient ces trésors dans les bateaux qui nous inondaient avec les icônes de la Vierge Marie, de saint Joseph et autres Sainte Trinité qui terrassaient Lucifer et ses compagnons qui étaient de nègres originels, Satan et ses acolytes n’ayant jamais eu un teint blanc !

L’arbre sacré, dans la journée, était le siège du Tribunal de céans. Quand il y avait un problème de vampirisme, un serment à prêter ou un pacte à sceller entre deux villages, c’est sous l’ombrage de l’arbre sacré que la séance se tenait. Le siège du roi était adossé sous l’arbre du côté nord et le peuple était devant lui au côté sud. Les prêtres siégeaient à sa gauche (Est) et les notables et autres grandes personnalités siégeaient à sa droite (Ouest) selon un protocole immuable.

Une société traditionnelle sans corruption!

Les affaires traitées sous l’arbre sacré étaient scellées définitivement et avaient force de loi. La corruption n’est donc pas un mot contenu dans le vocabulaire de l’homme de montagne. On pouvait acheter la conscience des gens pour les affaires diplomatiques (extension des limites territoriales, enlèvement d’une belle femme dans les royaumes limitrophes, etc.) mais on ne pouvait pas corrompre les gens pour les crimes, les délits graves, la fornication ou l’adultère. D’ailleurs, quand les débats étaient clos, les juges qui venaient prononcer le verdict étaient masqués (NKOUNGA) et le verdit était le bannissement. C’est toujours un soldat masqué qui accompagnait le coupable jusqu’à la limite du village. Les peines d’emprisonnement (privation totale ou partielle de liberté) étaient inconnues dans notre sérail et le condamné pouvait soit faire des travaux d’intérêt communautaire, soit donner des chèvres et des régimes de plantains à la cour, soit encore être banni si son crime était immonde.

Arrivée de la religion et dégradation de la tradition!

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L’Eglise s’est installée, pour notre malheur, sur les sites sacrés. Le colon a voulu nous phagocyter et nous rendre hybrides, sans passé ni avenir.
Souvenez-vous du Roi Belge qui a donné des « recommandations fortes » aux missionnaires qu’il envoyait en Afrique.
Pour la petite histoire, les missions catholiques, protestantes et autres presbytériens se sont installées sur les sites sacrés où trônait depuis la nuit des temps un arbre sacré, donc précieux.
Il y a des descendants d’esclaves qui ont porté plainte pour avoir des prébendes sur les humiliations subies par leurs ancêtres. Quelle bassesse !
Nous devons porter plainte contre le colon (les missions ou Eglises de tous bords) pour destruction intentionnelle et criminelle du patrimoine mondial et divin.

Quelques exemples

À Nkongsamba, là où se trouve la cathédrale, il y avait un arbre précieux qui avait connu Hérode.
À Bafang, près de la cathédrale, il y avait un arbre précieux qui avait connu Cicéron et Plaute, et même Héraclès.
Le prétendu « homme de Dieu » les a coupés et expédiés en Europe pour fabriquer ses meubles, construire ses temples et ses palais, sculpter ses icônes.

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Des trésors qu’ils ont spoliés, volés et expédiés chez eux, en nous donnant en compensation « des médailles en cuivre et des chapelets », du rhum, du sucre, la poudre à canon,etc.

Charles SIEYADJE, le Scribouillard.

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