Depuis la découverte du patient zéro, en décembre 2019 en Chine, le monde entier reste scotché aux lèvres des firmes pharmaceutiques et les laboratoires investis dans la recherche du vaccin contre le nouveau coronavirus. S’il est question de sauver l’humanité de l’un des virus les plus mortels de ces dernières années, la découverte d’un vaccin revête aussi des enjeux tant économique que géopolitique.
Un peu plus de 9 mois après l’apparition du Covid-19, beaucoup d’espoirs reposent sur la course au vaccin. Le premier pays qui offrira le moyen d’immuniser les populations contre ce virus dévastateur pourra en tirer un avantage aussi en termes de “soft power”. Et ce, qu’importe les erreurs précédemment commises dans la gestion de la crise sanitaire.
Le 11 août, le président russe Vladimir Poutine avait annoncé qu’un premier vaccin “assez efficace” avait été enregistré en Russie par le Centre de recherches en épidémiologie et microbiologie Nikolaï Gamaleïa, à Moscou. C’était en partenariat avec le ministère russe de la Défense. Mais l’institut Gamaleïa est accusé de rompre avec les protocoles habituels pour accélérer le processus scientifique. D’après Bruno Lina, professeur de virologie à l’Université Lyon 1, “l’urgence est réelle mais il ne faut pas faire du “quick and easy”.
Dans la même lancée, Donald Trump a annoncé le 23 août 2020 une “percée historique” dans le traitement du Covid-19, avec l’autorisation de la transfusion du plasma sanguin des personnes guéries à des patients hospitalisés. Un traitement dont l’efficacité laisse encore de nombreux experts sceptiques.
La Chine, épicentre de la pandémie, affirme être déjà bien avancée.
La Commission européenne, plus raisonnable et plus sage, a quant à elle conclu, au nom des Vingt-Sept, des accords avec cinq entreprises pharmaceutiques travaillant sur le vaccin anti-Covid pour s’assurer que l’ensemble des Etats de l’Union européenne pourront être approvisionnés rapidement et en quantité suffisante, dès qu’un vaccin sera jugé efficace.
A ce jour, l’OMS suit plus de 170 projets de vaccin à travers le monde. Plusieurs laboratoires ont annoncé être entrés en phase 3 de leur essai clinique. Il s’agit de déterminer si leur vaccin est efficace et s’il présente une balance bénéfice-risque positive. Si cette phase s’avère concluante, les premiers vaccins devraient être disponibles d’ici la fin d’année 2020.
La phase 3 des essais cliniques est la plus critique puisqu’il s’agit des injections sur l’homme. C’est donc la phase décisive visant à vérifier l’efficacité du vaccin avant sa mise sur le marché. Actuellement, les têtes de course sont les Etats-Unis via l’entreprise Moderna, le laboratoire suédo-britannique Astrazeneca et la Chine avec le laboratoire Sinopharm.
La course effrénée au vaccin anti-Covid comporte un risque: celui de bafouer les processus scientifiques au profit d’une célérité à tout prix. Il est clair que le pays qui réussira à élaborer un vaccin efficace aura l’honneur d’approvisionner le reste du monde et bénéficiera d’une reconnaissance planétaire. Il est néanmoins question au milieu de cette furie, d’éviter de confondre vitesse et précipitation.
Le développement d’un vaccin contre une nouvelle maladie peut prendre entre neuf et quatorze ans.
Afin d’éviter que la course au vaccin ne vire au pugilat entre Etats, l’OMS a depuis le début de la pandémie, plaidé en faveur de son dispositif d’accès au vaccin. “Nous devons prévenir le nationalisme vaccinal”, a déclaré le directeur général de l’Organisation, Tedros Adhanom.
Oscarine NANA