L’explosion de l’insalubrité au Cameroun est devenu une opportunité pour certains jeunes de sortir du chômage et se trouver un emploi. Dans la ville de Yaoundé, plusieurs se sont lancés dans le ramassage d’ordures ménagères, au sein des quartiers et marchés, malgré l’arrêt des activités de l’entreprise HYSACAM.
ELOUNDOU Martin n’a que 14 ans et n’a pas pu être inscrit à l’école cette année. Il a trouvé un moyen de se faire de l’argent pour préparer l’année scolaire prochaine, dans le ramassage d’ordures ménagères, ici à Messassi Yaoundé. « J’ai saisi l’opportunité en voyant comment HYSACAM ne passait plus dans les quartiers pour le ramassage d’ordures. Et je me suis lancé avec la brouette. Chaque ramassage coûte 500F CFA. Nous sommes déjà nombreux et nous avons arrêté ce prix officiellement. Les gens payent sans problème », nous explique le jeune adolescent, sans aucun gangs aux mains, ni cache-nez, mais exposé aux odeurs et autres, dans un dépôt d’ordures au marché Messassi à Yaoundé.
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L’enjeu environnemental et sanitaire
Le jeune ELOUNDOU n’est pas le seul acteur dans ce business de ramassage d’ordures ménagères au Cameroun. Plusieurs comme il a si bien précisé, sillonnent de plus en plus dans les quartiers et marchés, à la recherche d’ordures à ramasser. Mais la gangrène dans tout ce chemin vers la recherche des moyens de subsistance, est le risque sanitaire.
En effet, l’enjeu sanitaire est bien plus important pour ces jeunes gens exposés aux maladies liées à l’insalubrité. René Joly Assako Assako, Carine Alix Djilo Tonmeu et Daniel Bley, dans leur ouvrage publié en 2010 sur « Sociétés environnements santé », précisent en effet que les « eaux usées et ordures ménagères contiennent des produits toxiques, une forte charge en agents pathogènes et en parasites de toutes sortes, qui en polluant les milieux de vie, de loisirs et de consommation exposent les populations à un risque sanitaire permanent ». Il existe plusieurs maladies liées à l’insalubrité dont les citoyens engagés dans le ramassage d’ordures ménagères en sont exposés.
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Tout de même, les milieux insalubres ou les eaux souillées, sont des réceptacles de germes de nombreuses maladies telles que le choléra, les gastro-entérites, la dysenterie amibienne, les helminthiases, etc. Et d’après le résultat des enquêtes auprès des ménages et les statistiques médicales, « après le paludisme, les maladies d’origine hydrique représentent la première raison de consultation médicale ».
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L’activité reste néanmoins une source de revenu, et lutte contre le chômage des jeunes
Malgré le danger dont les jeunes ramasseurs d’ordures font face, cette activité reste une bonne source de revenu. Plusieurs témoignent de l’impact économique de ce travail sur leur quotidien. « 500 FCFA par ramassage, me donne environs 5000 FCFA par jour d’économie mis à part ma ration et autres besoins. Je vais économiser pour retourner à l’école l’année prochaine, et pourquoi pas investir ailleurs? », se réjouit le jeune Martin ELOUNDOU, toujours dans son activité de vidange de sa brouette après un tour de ramassage effectué.
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D’aucun ont dû muter d’activité ici au marché de Messassi. Surtout pendant cette période où l’unique entreprise d’Hygiène et Salubrité du Cameroun(HYSACAM), attend de la part de l’État, le paiement de la dette pour le travail abbatu. « Je vendais d’abord les fruits. Mais depuis le retour des pluies, je me suis essayé dans le ramassage d’ordures en attendant. Je gagne plus. Nous utilisons des désinfectant et on se lave avec l’eau de javel en fin de journée. C’est ainsi », affirme un autre jeune engagé.
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Ce coup de main semble ne réduire en rien la tendance de la situation insalubre au Cameroun ces derniers mois. Malgré que l’État ait payé une partie de la dette de près de 10 milliards à l’entreprise HYSACAM, au mois de Novembre dernier, avant la CAN 2021, l’entreprise attend encore énormément. Les employés en grève doivent être rémunérés pour que le pays soit propre et à l’abri des maladies comme le choléra qui peut encore ressurgir.
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En attendant, quelques jeunes en profitent pour leur survie au quotidien! Et pourront même se positionner? « même si HYSACAM revient en force, je ne vais pas arrêter, mais je vais développer cette activité pour plus d’ouverture », clôture Martin avant de courir pour le prochain ramassage, au marché Messassi ce 12 mai 2022.